jeudi 15 juillet 2010

Janelle Monaé : la Pompadour et les prolétaires

Janelle Monaé continue de faire parler d'elle. Alors que nous annoncions la sortie de The ArchAndroïd, son premier album, dès le 12 mai dernier, nous nous étonnions depuis de ne pas avoir pas vu l'album chroniqué dans Vibrations (alors que même Les Inrocks lui avait consacré une pleine page très élogieuse).

Ce n'était pas un oubli ou un mépris de la rédaction, juste une manière de reculer pour mieux sauter, puisque Miss Monaé fait la couverture de leur numéro de l'été, au titre de révélation de l'année. Le Dr. Funkathus estime ce choix éditorial tout à fait justifié. Le talent de Janelle Monaé ne fait aucun doute. Elle est une artiste ambitieuse et la diversité de styles brassés sur son album témoigne justement de ce talent.

Sa détermination ne fait également aucun doute. Son énergie est au service de son seul but, sa réussite artistique. Si son physique est celui d'une femme-enfant, il se dégage d'elle une force étonnante. Une apparence verrouillée qui ne laisse aucune place à la faiblesse. Est-ce parce que dans cet album-concept, elle endosse le rôle d'une androïde ? On sent que la demoiselle possède une véritable carapace.

La première couche de cette carapace en question étant bien sûr son look étonnant. Bien sûr, quand on la découvre, on ne peut qu'être frappé par l'originalité de celui-ci, avec nœud-pap' de rigueur et banane protubérante.

Certains pourraient s'en arrêter là. Pareille coiffure intrigue. Le site féminin Pure Trend propose même à ses lectrices des conseils pour la reproduire : "Je veux la même banane que Janelle Monaé". On peut y lire cette phrase horrible : "Janelle Monae, c'est une voix, un style mais avant tout une coiffure". La pauvre est "avant tout une coiffure" !!!
Pas bégueule, elle donne quand même des "conseils hypissimes pour maîtriser la coiffure iconique d'une it-girl. Leçon de coiffure par Janelle Monae Herself" (sic)...

Si ça vous intéresse malgré tout :


Si vous avez eu la patience de regarder cette brève vidéo, vous aurez donc noté que cette banane-chignon n'est pas une "Pompadour", ni une "Elvis", mais une "Monaé". Eh oui, tant qu'à faire, elle a donné son nom à sa coiffure. Et Mademoiselle Monaé prévient ses éventuelles imitatrices, il faut avant tout de la patience pour se coiffer de la sorte.


Mais cela n'empêche pas le naturel capillaire de reprendre le dessus. Comme lors de son récent passage à la Maroquinerie, le 5 juillet dernier. Dans une si petite salle, c'était bien évidemment à guichets fermés qu'eut lieu le concert. Le site de Vibrations propose un compte-rendu de ce spectacle très attendu. Janelle Monaé, tout en revendiquant son indépendance, se fond dans la tradition américaine du show-biz : c'est une grande pro. Tout est en place, carré, réglé, impeccable.

Comme le décrit Lysiane Ngoye pour Vibrations, "une interprétation personnelle guitare-voix pleine d’émotion de Smile de Charlie Chaplin sera le seul véritable moment où Miss Monae se montrera vulnérable, avant de repartir de plus belle avec le fameux Tightrope et sa mise en scène Jamesbrown-esque avec pas de danses fluides et fin de plateau à genoux, cape sur le dos. Il faut reconnaître qu’en plus de posséder une voix de rossignol, la demoiselle a un sens du rythme implacable".

A lire les commentaires postés sur leur site, on constate que certains des veinards ayant assisté au concert regrettent cette mise en place trop millimétrée : "aucune place à l’imprévu si ce n’est ce chignon qui se défaisait souvent". C'est probablement un faux procès qui lui est fait là. C'est ignorer que le professionnalisme des entertainers américains s'accommode assez mal de l'approximation et de l'improvisation.

Le Bon Tempo propose un petit résumé de ce premier concert parisien. Et même si elle a la pompadour qui part en vrille, elle assure grave.


Et plutôt que de juste se demander comment reproduire la coiffure de Janelle, peut-être serait-il plus intéressant de connaître le sens qu'elle donne à son look, ce qu'elle explique pour Vibrations...

"Je porte un uniforme noir et blanc pour la classe ouvrière. Ma mère était concierge, mon père conduisait des camions-poubelles, mon beau-père travaille actuellement dans un bureau de poste, ce qui fait que je suis liée à ce monde. (...) J'ai été femme de ménage avant d'aller à l'école, afin de me faire assez d'argent pour suivre mes études universitaires. Donc je comprends et je me sens liée avec ceux qui triment chaque jour, et ils doivent être motivés. Ils ont besoin d'être motivés et d'être inspirés, car ils essaient de créer quelque chose à partir de rien, et il s'agit de leur rendre hommage, ainsi qu'à mes ancêtres, à ceux qui ont travailler vraiment dur pour y arriver". (Vibrations n° 126)


Cependant, de l'interview qu'elle a accordée à Vibrations, la partie la plus surprenante est quand surgit un peu de mystère là où on s'y attend le moins. Interrogée sur le lieu de tournage du clip de "Tightrope", le Palace of the Dogs, elle répond très sibylline : "c'est un sanatorium. Je ne peux cependant pas vraiment en parler car il existe toujours et j'y ai été patiente. J'ai signé un papier dont les clauses m'empêchent de révéler tout ce qui s'y passe, les gens qui y sont et pourquoi ils y sont, mais j'y ai enregistré de la musique". Et si le journaliste la relance et lui demande de dire pourquoi elle a enregistré là-bas, la réponse est sans la moindre ouverture : "non, je ne peux pas".
Pourquoi donc être allée filmer là-bas si le lieu est si secret ? Si ce n'est bien sûr pour justement attirer l'attention. Quelle raison l'a amenée à en être une patiente ? Y a-t-elle signé un pacte ? Et lequel ? Est-ce avec le diable en échange d'une carrière de star ? Y est-elle devenue une cyborg, une androïde ? Dans pareille situation, l'imagination sera toujours plus belle que la réalité.

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